Interview with TV producer, Jérémy Michalak
By LanguaTalk
In this episode, Gaelle interviews Jérémy Michalak, a French TV producer. For the past 10 years he has worked with Lucie Carrasco, a heavily disabled French woman, in her trips around the world. In this interview, you will understand how difficult it was to cast and show disability on TV in France, why the duo Jérémy/Lucie is a unique one, and why inclusive cities matter.
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Transcript of interview jeremy.mp3
Gaelle:
Bonjour à toutes et bonjour à tous! Bienvenue dans ce nouvel épisode de Languatalk Slow French. Aujourd'hui, j'ai le plaisir de vous proposer une interview avec Monsieur Jérémy Michalak et c'est la première fois que je vous propose une interview avec une personne qui est célèbre, qui est connue en France! D'habitude, je vous propose des interviews avec des membres de ma famille ou des amis. Et bien Jérémy Michalak est un producteur de télévision en France et il a même sa propre page Wikipedia (qui est pour moi le symbole de la réussite).
Gaelle:
Cette interview, elle a été possible grâce à un auditeur, Hunter, qui est américain et qui un jour m'a envoyé un email pour me proposer de me mettre en contact avec Monsieur Michalak. Parce que Hunter avait entendu l'épisode où je parlais du film "Un petit truc en plus" qui parle du handicap. Et Jérémy Michalak est un producteur de télévision qui fait une émission où on parle du handicap. Et donc, grâce à cet auditeur, nous nous sommes mis en contact et nous avons réussi à enregistrer cette émission. Donc merci beaucoup à Hunter, cet auditeur et merci à Jérémy Michalak d'avoir accepté cette interview.
Gaelle:
Je vous préviens, il parle vite, plus vite que moi. Et il utilise beaucoup d'expressions françaises très utiles, très sympas. Donc regardez bien la transcription si c'est un peu trop rapide pour vous. Et regardez bien le vocabulaire qui est sur le site internet de LanguaTalk, parce que toutes ces expressions sont vraiment très intéressantes et j'espère utiles pour vous dans votre vie si vous parlez français. Merci d'être là avec nous et bonne écoute.
Gaelle:
Bonjour Jérémy et merci d'être avec nous.
Jérémy:
Bonjour Gaelle. Merci pour votre invitation.
Gaelle:
Alors on va rentrer tout de suite dans le vif du sujet et j'aimerais que vous nous parliez de votre travail avec Lucie Carrasco. Peut-être que vous pouvez déjà nous dire qui est Lucie. Et donc qu'est-ce que vous faites avec elle?
Jérémy:
Qui est Lucie? On n'aura pas le temps de faire le tour de la question. Lucie est une jeune femme qui a une maladie qui s'appelle l'amyotrophie spinale (spinale amyotrophia), qui est une maladie qui la condamne à rester assise sur un fauteuil roulant, qui est une maladie dégénérative, donc une maladie qui évolue et pas dans le bon sens, qu'elle a depuis la naissance. Donc en théorie, elle n'est pas censée pouvoir bouger. Ses bras, ses jambes ne bougent quasiment pas. Sauf que son truc à elle, c'est qu'elle aime voyager. Ça tombe mal. Et Lucie, un jour, m'a envoyé une idée. Moi, je suis producteur d'émissions de télévision et un jour, Lucie m'a contacté en me disant: "voilà, j'ai cette maladie mais j'ai très envie de voyager. Est-ce que tu as envie de m'emmener parcourir le globe? Si oui, allons y!". Voilà l'histoire de Lucie. Et depuis maintenant dix ans, on voyage partout dans le monde avec Lucie pour découvrir des endroits incroyables.
Gaelle:
Très bien. Donc si on reprend: Lucie est quelqu'un qui a un handicap moteur très lourd et donc elle est sur un fauteuil roulant -a wheelchair. Et effectivement, je vous mettrai des liens mais pour des vidéos, pour que vous voyiez. Mais ce n'est pas du tout la personne qu'on imagine pouvoir voyager dans le monde.
Jérémy:
C'est rigolo parce que lorsqu'elle m'a contacté, elle ne m'a pas parlé de son handicap totalement. Elle m'a juste dit: "je suis en fauteuil roulant". Moi, j'imaginais un athlète handisport capable de faire des choses. Non, pas du tout. Non, c'est pas ça. C'est un très très très très gros handicap.
Gaelle:
Oui, effectivement, elle a... Cognitivement, c'est fantastique. Elle peut parler, penser, réfléchir. Mais en termes moteurs, elle est très très limitée effectivement, dans ses mouvements.
Jérémy:
En termes moteurs, elle ne peut rien faire! À part prendre une fourchette et se maquiller un peu. Voilà, c'est tout ce qu'elle peut faire. Et parler et dire beaucoup de choses. Ça, il n'y a pas de problème.
Gaelle:
Elle parle beaucoup. Exactement.
Jérémy:
Elle parle beaucoup.
Gaelle:
Donc c'est Lucie qui vous a contacté. Parce qu'effectivement, à l'époque, vous étiez déjà producteur d'émissions de télévision. Qu'est-ce qui vous a plu dans son histoire? Pourquoi vous vous êtes dit: "Ok, je vais faire ça".
Jérémy:
La seule chose qui m'a réellement plu dans son histoire, c'est le personnage. C'est la personnalité de Lucie. Au delà du handicap, au delà de ce qu'on pouvait faire dans ces voyages, ce qu'on pouvait imaginer. Non, le point de départ, vraiment, c'est que j'ai été séduit par la personnalité de Lucie qui, je trouve, présente une image du handicap ou d'une personne handicapée qu'on n'a pas l'habitude de voir en France.
Jérémy:
En tout cas, nous, en France, il y a dix ans, à la télévision, des handicapés, on les voyait dans ce qu'on appelle le Téléthon, qui est une émission durant laquelle des personnes qui ont des myopathies comme Lucie demandent à ce qu'on donne de l'argent pour la recherche, pour la science, etc. Mais c'est le seul moment de l'année où on voyait des handicapés à l'antenne. Alors on voyait des enfants, souvent avec leurs parents. Tout le monde très mal habillé. Ce n'était pas sexy, ce n'était pas du tout sexy. C'était... C'était pas fun. C'était souvent quelque chose qui était émouvant parce qu'on voyait vraiment des gens impactés par la maladie, etc. C'était vraiment pathétique. C'est pas exactement le terme, mais... En tout cas, ce que proposait Lucie était quelque chose de très différent de ça. Et c'est ça qui m'a intéressé. C'est de montrer un handicap, une handicapée parmi les handicapes et les handicapés qui avait un discours différent et une attitude et une énergie différente de celle qu'on voyait jusque là.
Gaelle:
Oui, parce qu'avant, donc le Téléthon, c'était pour faire pleurer, pour que les gens soient avec une émotion pour avoir envie de donner de l'argent.
Jérémy:
On s'est dit que pour donner, c'était bien d'émouvoir. Ce qui n'est pas faux, ceci étant dit. Mais la philosophie de Lucie est très différente. Et elle n'attend pas qu'on lui donne des choses. Elle, ce qu'elle attend, c'est juste qu'on l'aide un peu à vivre ses rêves pleinement et toute sa folie.
Gaelle:
Et Lucie, (pour vous les auditeurs, j'espère que vous pourrez regarder des petits clips vidéos sur internet), elle a un humour incroyable. C'est quelqu'un de très drôle et quand on la regarde, je trouve après cinq minutes, on oublie le handicap, on oublie le fauteuil. Juste, on écoute cette personne qui est très très drôle.
Jérémy:
C'est ce qui s'est passé. Et quand je l'ai rencontrée pour la première fois, on était dans un café à Paris et elle me dit: "Bon, je préfère le dire tout de suite, je n'aime pas les handicapés". Ah bon? Ok, ça tombe mal, ça tombe mal. Voilà. Et donc ça a commencé par cette blague et ensuite ça a été joke sur joke, sur joke. Et c'est ce qu'il fallait pour me séduire et pour me donner envie d'aller plus loin.
Gaelle:
Et donc, quand Lucie est venue vous voir pour vous présenter ce projet, vous, vous avez dit oui, mais est-ce que vous étiez le premier qu'elle venait voir, le premier producteur?
Jérémy:
Non, je pense qu'elle a fait le tour de tous les producteurs de l'époque. Que tout le monde a refusé. Moi au début, c'est pas que j'ai refusé, au début je n'ai pas répondu. C'est à dire que la première fois qu'elle m'a envoyé, je recevais à cette époque-là beaucoup de demandes de gens qui avaient des projets, qui voulaient faire des choses X ou Y. Et donc j'ai pas répondu, j'étais trop occupé, je faisais beaucoup, beaucoup de choses. Donc voilà. Puis elle m'a envoyé un deuxième mail, un troisième mail, quatrième mail. Et un jour, j'ai trouvé le temps de répondre et surtout de m'intéresser un peu plus à son histoire, à son projet. Et ça m'a donné envie de la rencontrer pour savoir qui elle était. Voilà. Mais elle avait fait le tour de tous les producteurs de Paris qui ont, soit pas répondu, soit ont dit non.
Gaelle:
Donc ensuite, vous, vous avez dit oui. Et comment ça se passe? Vous avez monté le projet ensemble, vous avez choisi un premier pays, un premier voyage?
Jérémy:
On a choisi un premier pays qui était son rêve absolu. Donc traverser les États-Unis de New York jusqu'à Los Angeles. Donc East coast - West coast, d'Est en Ouest. Et ensuite, ça me semblait assez facile de vendre ce projet à une chaîne de télé. C'est comme ça que ça se fait. Moi, encore une fois, à l'époque, je produisais beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de très grosses émissions. Donc vendre une petite émission comme celle-ci, ça me semblait être très simple. D'autant qu'on a cette idée, on a ce pays. Donc on sait que les États-Unis c'est toujours quelque chose d'assez formidable à regarder. Et puis surtout, on a ce personnage de Lucie qui, à mon sens, méritait vraiment qu'on la suive et qu'on raconte son histoire. Et donc ça me semblait très facile à vendre.
Jérémy:
Et c'est là que je me suis trompé et ça m'a pris quatre ans. Pendant quatre ans, je suis allé voir régulièrement toutes les chaînes de télé et tous ces gens là pour leur dire: "Hey, tu sais, j'ai ce projet avec Lucie Carrasco". Et pendant quatre ans, on me l'a, on me l'a rejetée. Parce que je pense que c'est une époque où on ne voulait pas voir des handicapés à l'antenne, à l'image. À part pendant le Téléthon. Mais sinon c'est quelque chose qui... Aujourd'hui c'est bien plus démocratisé et sans doute tant mieux, en France en tout cas. Et ça commence à changer de manière importante. Mais à l'époque, je crois qu'on ne voulait pas et c'est pour ça qu'on m'a rejeté ce programme. Et puis un jour, un jour, il y a un des patrons d'une chaîne de télé, Richard Lenormand, qui m'a dit: "Oh, si! Ça m'intéresse, faisons-le!" Voilà. Et on l'a fait.
Gaelle:
Mais donc il a... Il fallait une bonne personne, toi, et ensuite une bonne personne pour diffuser l'émission. Mais ça veut dire qu'avant ça, Lucie a eu énormément, énormément de refus de producteurs et de diffuseurs. Donc ça montre que dans la société française, il y avait un manque de visibilité pour montrer des personnes avec des handicaps. On parle souvent de société validiste. C'est quand on montre seulement les personnes valides, sans handicap. Et donc vous avez l'impression que ça, ça change de manière positive, vraiment en France?
Jérémy:
Oui. Alors je ne sais pas si c'est symbolique ou si c'est quelque chose d'effectif, mais ce qui est certain, c'est qu'aujourd'hui il s'est passé des choses. Voilà. C'est à dire qu'il y a nos films avec Lucie, il y a un animateur de day time, d'émissions quotidiennes chaque jour sur une grosse chaîne qui n'a pas de bras. C'est rare de voir un animateur de jeux qui n'a pas de bras. Il y a un autre monsieur qui s'appelle Philippe Croizon, qui a plus de bras, plus de jambes et qui fait des trucs incroyables, qui est hyper drôle et qui fait des défis. Il a traversé la Manche à la nage. C'est un aventurier et on le voit du coup maintenant à la télévision.
Jérémy:
Au cinéma, il y a évidemment eu Intouchables. Il y a eu dernièrement Artus, qui est un réalisateur français, qui a fait un film avec notamment des trisomiques, qui s'appelle "Un petit truc en plus". Gros succès. Il y a un talk-show sur France Télévisions dans lequel des autistes interviewent des célébrités. Ils ont interviewé Emmanuel Macron, Omar Sy, etc, etc. Bref, il commence à y avoir des choses dans lesquelles on voit des personnes handicapées. Il y a beaucoup de fictions dans lesquelles on met à l'honneur des personnes handicapées à différents niveaux de handicap.
Jérémy:
Il y a une série sur TF1 qui est la première chaîne de France. La série s'appelle Toulouse-Lautrec et ça raconte l'histoire d'une lycéenne qui est exactement comme Lucie. D'ailleurs, on se demande à quel point ça n'a pas été un peu inspiré par la personnalité de Lucie. Bref, il se passe des choses.
Pour autant, la France est un vieux pays qui a été construit en partie il y a très très très longtemps. Donc la question de l'accessibilité, à savoir est-ce qu'un handicapé peut rentrer dans un restaurant, peut rentrer dans une mairie, musée? Là-dessus on n'est pas au point, vraiment. Le métro, je n'en parle pas. Là-dessus, on n'est pas au point.
Mais on a aussi eu les Jeux handisport à Paris qui ont eu un très gros succès l'été dernier. Il y a eu les Jeux pour les valides, les Jeux olympiques et paralympiques qui ont eu vraiment, pour la première fois, un vrai succès, un engouement. En règle générale, les handisport, c'est le moment où on éteint la télé, on part à la plage, on va faire autre chose. Pas cette fois. Cette fois, il s'est passé quelque chose. Donc on se dit que bah, on commence à les regarder, les handicapés, et on les regarde avec un bon regard.
Gaelle:
Ce n'est plus justement cette pitié qu'on essayait de montrer peut-être pendant le Téléthon. C'est de montrer des gens juste avec une vie normale. Et oui, ils ont un handicap, mais ce n'est pas l'histoire principale.
Jérémy:
Exactement.
Gaelle:
Avec Lucie, l'histoire principale, c'est le voyage et oh by the way, elle a un handicap. Mais...
Jérémy:
C'est ça! Ça c'est un truc qu'on a réussi à faire grâce à Lucie et qui s'impose naturellement, c'est qu'on oublie effectivement le handicap. Ça s'efface. Et on a toujours dit que ce n'était pas un documentaire SUR le handicap. C'est un documentaire sur Lucie et par la force des choses, aussi un peu sur le handicap évidemment. Parce qu'il est là, parce qu'il génère des situations, il génère des rencontres, il génère des galères, des imprévus, des choses. Et il est là. Mais c'est pas: On suit une personne handicapée qui s'appelle Lucie. Non. C'est: on suit Lucie et il se trouve qu'elle a un handicap. Peut-être que si elle n'avait pas ce handicap, évidemment, on ne l'aurait pas non plus suivi parce qu'elle n'aurait pas eu la personnalité qu'elle a aujourd'hui, qui est liée à son, à sa, à sa spécificité. Mais en tous cas, ce ne sont pas des films sur le handicap, c'est sûr.
Jérémy:
D'ailleurs, le premier film qu'on a fait, donc la traversée des Etats-Unis en fauteuil roulant, commence par un titre écrit: "Ceci n'est pas un film sur le handicap. Ceci est un film sur Lucie Carrasco".
Gaelle:
Et donc, quels voyages vous avez fait ensemble? Quels pays?
Jérémy:
Alors on a fait, dans l'ordre: nous avons traversé les Etats-Unis d'est en Ouest. Nous avons fait le Japon, le.. une partie du Brésil. Une petite partie du Brésil. C'est un peu grand, le Brésil. Nous avons fait le Québec. Nous avons fait la Californie. On a fait un focus sur la Californie. Nous avons fait ensuite l'Australie. On a fait deux épisodes en Australie. Là, on vient d'en tourner un en Thaïlande, qui n'a pas encore été diffusé. Et dans quelques jours, à la télé en France, on va découvrir "le Tour de France de Lucie". On a fait le Tour de France.
Gaelle:
Incroyable! Et donc, est-ce que, parce que vous nous disiez qu'en France on a encore un gros problème d'accessibilité, que les bâtiments publics ne sont pas accessibles - est-ce que du coup vous avez vu une grande différence avec d'autres pays?
Jérémy:
Oui. Ce qui est sûr, c'est que, par exemple, aux États-Unis, tout est accessible, que les handicapés sont inclus dans la société. Ils peuvent rentrer partout, aller travailler. Comme ils travaillent, ils gagnent des sous, comme ils gagnent de l'argent, ils peuvent aller dans un bar, boire un verre en fin de journée.
Gaelle:
Et donc être consommateurs et acteurs de la société.
Jérémy:
Et c'est un cercle. Exactement. Et donc du coup, l'accessibilité permet de faire tourner ce cercle ou de rentrer, en tout cas, dans ce cercle vertueux.
Jérémy:
Le Brésil, évidemment beaucoup moins accessible parce que pays beaucoup moins développé. Mais on n'a été bloqué nulle part. Le Brésil, on a quand même traversé la jungle, donc on a dû la porter et tout dans des conditions abominables. C'était c'était un truc terrible, mais vraiment! Là, on a eu peur. C'est la seule fois où vraiment on a eu peur je crois.
Jérémy:
Le Japon, tout était accessible. Le Japon, c'est très marrant parce qu'on ne voit pas d'handicapés au Japon, mais je pense que c'est accessible parce qu'ils ont beaucoup de personnes âgées et les besoins des personnes âgées sont souvent.
Gaelle:
Sont similaires.
Jérémy:
Ouai. Souvent les mêmes. Je sais qu'il y a une ville au Danemark je crois, qui est une ville test dans laquelle ils ont voulu revoir toutes les infrastructures pour les adapter aux personnes âgées. Donc il y a plus de bancs dans les rues pour qu'ils puissent faire une pause quand ils marchent. Les espaces sont plus larges, il y a moins de marches, il y a plus de rampes et tout ça. Et c'est exactement les besoins qu'on peut avoir quand on est en fauteuil roulant.
Gaelle:
Mais en fait, une ville plus accessible et inclusive, c'est très positif pour les parents, avec des poussettes, avec des enfants, les personnes avec des fauteuils, des béquilles et les personnes âgées. Donc en fait une ville plus inclusive est positive pour beaucoup de gens. Pas seulement la petite minorité que l'on peut dire avec les fauteuils roulants.
Jérémy:
Complètement. Je sais qu'il y a Lucie qui dit ça. On parle de la ville de Cannes en France, qui est une ville dans laquelle il y a une population qui est relativement âgée. On fait souvent une joke sur Cannes en disant que c'est une ville de vieux, etc. C'est vrai. Mais du coup la ville est totalement accessible. Et pour Lucie, c'est la ville la plus accessible de France. Et elle dit dans le film, elle dit: "bah voilà, vous voyez, en fait, grâce aux handicapés, ça va devenir encore plus accessible pour les vieux. Un jour vous me direz merci!". Et ben ouais.
Jérémy:
Et ce qui est intéressant aussi, c'est que à Paris, on voit vraiment un truc très différent. Il y a un vrai décalage avec Paris. Parce que Paris non seulement c'est pas adapté, mais en plus on s'en fout et on ne respecte pas. Donc c'est très compliqué pour les personnes en situation de handicap et pour les femmes avec des poussettes etc. De faire des choses comme ça à Paris, de pouvoir se déplacer tout simplement.
Gaelle:
Oui, Paris c'est une ville pour les jeunes, mobiles, valides et sans enfants.
Jérémy:
Exactement. Non, mais c'est exactement ça.
Gaelle:
Et donc cette émission que vous faites depuis dix ans maintenant, elle est diffusée, elle est visible où?
Jérémy:
Elle est visible en France sur la chaîne nationale française qui s'appelle France5. Elle est diffusée en prime time tous les ans. Chaque année, on diffuse un nouveau voyage. Et la prochaine sera diffusée début juillet en France. Et ensuite, on doit pouvoir la voir sur la plateforme de la chaîne. Mais je ne pense pas qu'on puisse l'avoir partout dans le monde. À mon avis, c'est Géo-bloqué en France. Peut-être sur TV5 Monde.
Gaelle:
Oui malheureusement quand moi j'ai essayé (donc moi j'habite en Angleterre), quand j'ai essayé de regarder, je n'ai pas essayé de TV5 Monde mais j'ai essayé juste France cinq et c'était bloqué.
Jérémy:
Ouai... Ouai bien sûr. Je peux faire des locations, je peux louer. Ce n'est qu'une histoire d'argent. C'est simple, c'est simple à régler. C'est simple.
Gaelle:
Et donc, est-ce que cette émission, elle est populaire? Est-ce qu'il y a du public? Est-ce que vous savez si les gens regardent.
Jérémy:
Si ça ne fonctionnait pas, il n'y en aurait plus. Ça c'est sûr, c'est la règle. Donc, c'est une émission qui est regardée normalement. C'est ni un énorme succès, ni... Je parle d'audience, de ratings, du show. Mais c'est une émission qui fait beaucoup parler. C'est à dire que dès que c'est diffusé, on a énormément d'articles. On est, nous, invités à la télé, à la radio pour faire la promotion. Et c'est un show que tout le monde adore. Ce n'est pas le plus populaire des shows de France, mais c'est une émission que tout le monde adore parce que c'est.. Parce que c'est feel good, parce que Lucie est quelqu'un dont on tombe sous le charme facilement. De son énergie, de sa motivation, de sa folie et tout ça. Et puis je crois qu'on est assez marrant tous les deux et que c'est politiquement incorrect, mais juste ce qu'il faut. Comme on dit en français, c'est un petit bonbon, c'est vraiment un petit bonbon.
Gaelle:
Oui, parce que ce qu'on n'a pas dit, c'est que, donc vous êtes producteur, mais en fait, dans toutes ces émissions, avec Lucie, vous êtes devant la caméra, vous n'êtes pas derrière.
Jérémy:
Les deux.
Gaelle:
Vous êtes avec elle.
Jérémy:
Les deux. Je suis partout. Vous savez, c'est des émissions qui ont des tout petits budgets. Il y a très peu d'argent en fait dans la télé en France. Mais alors pour ces émissions là, encore moins. C'est un peu un mal pour un bien. C'est à dire que quand on m'a dit oui, quand la chaîne, la première chaîne de télé m'a dit "oui, ok, on le fait", on m'a donné un financement qui n'était pas suffisant. Et j'en avais marre d'attendre. Et puis ça faisait quatre ans qu'on me disait "non". Donc j'ai dit: "OK, vous savez quoi? Ce qui manque, c'est moi qui vais payer. Donc je vais financer. Ce n'est pas énorme, mais je vais le financer de ma poche". Et surtout pour pas trop dépenser, je vais tout faire. Donc je produis, je réalise, parfois je filme et surtout je suis avec elle, côte à côte. Comme, je ne sais pas.. "co-host", je ne sais pas comme on dit. Ou journaliste. Alors qu'au départ, moi je ne voulais pas partir. Moi je connais, je connais... Moi, les Etats-Unis, je veux bien les traverser, mais pour mes vacances.
Gaelle:
Ah ok!
Jérémy:
Et en fait, c'est un heureux hasard de s'être retrouvé dans cette configuration là. Et du coup, on est parti tous les deux. Et ce qui est génial, c'est que c'est comme ça qu'on a créé de manière très organique ce duo. Et c'est pour ça que parfois les gens me disent: "Mais tu ne penses pas que ce show pourrait exister dans un autre pays, avec une autre personne handicapée et un autre cohost et tout?". Et je ne sais pas quoi répondre. Parce que ce n'est pas fake, c'est pas artificiel.
Gaelle:
Non, c'est votre duo qui est authentique.
Jérémy:
C'est notre histoire en fait, c'est notre histoire.
Gaelle:
J'imagine que maintenant vous êtes amis en fait.
Jérémy:
Oui, bien sûr. Complètement. Ce qui n'était pas le cas au départ. Moi, j'étais producteur. Des personnages comme Lucie, j'en suivais quinze dans l'année, quoi. Donc c'était un personnage parmi d'autres personnages qui me semblait intéressant. Mais là, je me suis fait avoir.
Gaelle:
Et donc, quand vous partez pour filmer, vous partez combien de temps?
Jérémy:
Ça dépend. On part en règle générale une dizaine de jours.
Gaelle:
D'accord.
Jérémy:
À peu près dix jours. Ça pourrait aller plus vite. Mais on prend en compte le fait que Lucie a besoin de se reposer, qu'on ne peut pas tourner autant dans une journée avec Lucie qu'avec une personne en pleine forme. Et donc ça prend, ça prend dix jours à peu près. Mais c'est la colonie de vacances pour nous. C'est une petite équipe. C'est un peu... Là maintenant, c'est un peu comme partir en famille, en vacances quoi.
Gaelle:
Incroyable! Bon donc, pour les gens qui ne sont pas physiquement en France, peut-être avec un VPN pour regarder ou en louant pour regarder sur la chaîne nationale? Et donc quand est-ce que "Lucie en France", ça sort quand?
Jérémy:
Ca sera diffusé le 2 juillet.
Gaelle:
2 juillet. Et bien fantastique! Trop bien. Et bien j'ai hâte d'essayer de regarder. Je serai en France cet été donc j'essaierai de regarder chez ma famille.
Jérémy:
Génial! Super! Merci!
Gaelle:
Exactement! Et bien merci beaucoup pour cette interview.
Jérémy:
Merci beaucoup Gaelle. Merci de m'avoir invité et merci à celles et ceux qui nous ont écouté, regardé et peut-être même compris.
Gaelle:
J'espère. C'était un vrai plaisir. On a parlé de plein de choses et donc bonne continuation pour vos aventures avec Lucie et pour le reste.
Jérémy:
Ça marche! Merci beaucoup Gaelle. Et j'en profite pour saluer Hunter qui nous a mis en contact et merci!
Gaelle:
Tout à fait. Merci beaucoup Hunter.
Jérémy:
C'est un Américain à qui j'ai appris une phrase très importante en français pour dire au revoir, on se dit: "A plus dans le bus".
Gaelle:
Parfait! A plus dans le bus.
Jérémy:
À plus dans le bus.
Learning tips:
1. Follow the interactive transcript to read as you listen. You can replay a sentence by clicking on it.
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Look out for these words, and learn them:
- Une maladie dégénérative = a degenerative disorder
- Un fauteuil roulant = a wheelchair
- Bouger = to move
- Un producteur d’émissions = a TV program producer
- A l’antenne = on air
- Emouvant = moving
- Emouvoir = to move, to touch (emotionally)
- Drôle, marrant = funny
- Une blague = a joke
- Une chaîne de télé = a TV channel
- Un patron = a boss
- Un diffuseur = a TV broadcaster
- Une société validiste = a validist society
- Un animateur = a TV host
- Des galères (fam) = a pain, hell
- Des imprévus = something unexpected
- Un cercle vertueux = virtuous circle
- Les personnes âgées = old people
- Une poussette = a pushchair
- Des bancs = benches
- Expressions :
- Rentrer dans le vif du sujet = to get to the heart of the matter
- Faire le tour de la question = to examine the question from all sides, all angles
- Ça tombe mal = bad luck, bad timing
- Parcourir le globe = to travel the world
- Bref = anyway
- On n’est pas au point = we are not there yet
- Gagner des sous = to earn money
- Merde (familier) = shit
- Tomber sous le charme de quelqu’un = to fall under someone’s spell
- C’est un mal pour un bien = it’s a blessing in disguise
- J’en avais marre = I was fed up
- Financer de ma poche = to pay from my own pocket
- Je me suis fait avoir = I’ve been had, I’ve been tricked
- A plus dans le bus (familier) = see you later alligator
Références
- Lucie Carrasco = star de l’émission « Lucie en Californie »
- Le Téléthon = émission de télévision pour faire des dons pour les maladies génétiques rares
- Vidéo interview de Lucie Carrasco et Jérémy Michalak : https://www.youtube.com/watch?v=VMQVtSk8hug
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