Salut Hugo, tu vas bien
Ouais ouais ouais ça va et toi
Ça va, soulagé par rapport à il n'y a pas si longtemps où j'étais stressé par les élections, donc maintenant je peux dire que je vais mieux.
Oui car là au moment où on enregistre l'épisode, on est presque une semaine après le résultat définitif des élections législatives qui ont eu lieu en France. Vous en avez peut-être entendu parler, c'est le sujet de notre épisode aujourd'hui. Et bon, on voudrait présenter nos excuses parce que c'est vrai que ces dernières années, on a fait pas mal d'épisodes sur la politique et on sait que ça n'intéresse pas forcément tout le monde. Mais vous qui avez envie de mieux comprendre la France, la société française, bien évidemment ce qui se passe en politique, c'est assez important. Donc aujourd'hui avec Ingrid, on va vous expliquer pourquoi les dernières élections législatives qui ont eu lieu en France étaient particulièrement cruciales.
Oui et surtout on voudrait petit à petit vous expliquer comment on est arrivé à la situation actuelle, c'est-à-dire que aujourd'hui à l'heure où on enregistre l'épisode, on n'a pas vraiment de gouvernement ou plutôt on garde le l'ancien gouvernement alors qu'il y a ou une nouvelle première ministre, mais ou une nouvelle Première ministre, mais cette fois-ci, il ne l'a toujours pas fait. Le Premier ministre Gabriel Attal a présenté sa démission, mais le président Emmanuel Macron lui a dit non, je refuse parce que je ne sais pas qui nommer à ta place et voilà, on est dans cette situation aujourd'hui et on va vous expliquer pourquoi.
Oui, alors pour comprendre comment on en est arrivé là, on va d'abord vous expliquer ce qu'est la dissolution, la dissolution de l'Assemblée nationale. Donc pour le dire simplement, c'est quand le président de la République décide de virer, pour le dire familièrement, tous les députés de l'Assemblée. Il dit bon les députés, vous partez, on organise de nouvelles élections et on va élire de nouveaux députés pour représenter les Français au Parlement. Alors ça, ça fait partie des pouvoirs du président de la République et Emmanuel Macron a décidé de l'utiliser mais c'était une décision complètement inattendue, une décision qui a surpris tout le monde. Donc avec cet épisode, on va essayer de vous aider à mieux comprendre tout ça.
Pour vous expliquer ça, on va répondre à la question pourquoi Emmanuel Macron a-t-il décidé de dissoudre l'assemblée Quels étaient ses objectifs et pourquoi ça n'a pas marché On va faire ça en trois parties.
Donc dans la première partie, on va vous expliquer l'équilibre des pouvoirs en France, comment la politique fonctionne en France.
Ensuite, on verra comment cet équilibre a été fragilisé ces dernières années et comment ça a permis au Rassemblement National de monter.
Et puis pour terminer, on vous expliquera ce qui s'est passé concrètement à ces élections législatives, ce qui fait qu'aujourd'hui on a l'impression que la France est devenue ingouvernable. Pour comprendre le système politique en France, il y a trois institutions importantes à connaître. On a sûrement déjà expliqué ça dans un des précédents épisodes, mais on va faire un petit rappel pour vous rafraîchir la mémoire. Alors en France, le pouvoir est partagé entre le président de la République, Emmanuel Macron, le gouvernement qui est dirigé par le Premier ministre et le Parlement.
Alors le président, c'est le chef de l'État. Il a différents pouvoirs, notamment celui de nommer le Premier ministre et de dissoudre l'Assemblée.
Oui, c'est aussi le chef des armées, c'est lui qui a le code de l'arme nucléaire. Ensuite, le gouvernement, c'est comme je l'ai dit, le premier ministre qui est le chef du gouvernement et son équipe de ministres. Par exemple, le ministre de l'économie, le ministre du travail, et caetera. Eux, ils s'occupent de l'application des lois. Ils font en sorte que les lois soient bien appliquées et en fait, ils représentent avec le président de la République ce qu'on appelle le pouvoir exécutif.
Et ensuite on a le parlement qui représente lui le pouvoir législatif, donc législatif ça veut dire loi. Le parlement s'occupe de voter les lois. Il est composé de deux chambres, le sénat et l'Assemblée nationale, mais on va dire que la plus importante, celle qui a vraiment du pouvoir, c'est l'Assemblée nationale et c'est pour ça qu'on s'intéresse en général surtout à cette chambre-là. L'Assemblée nationale, c'est cinq-cent-soixante-dix-sept députés.
Oui et c'est pour ça qu'en France, on n'est ni dans un régime Le président a du pouvoir, il n'a pas juste un rôle Le président a du pouvoir, il n'a pas juste un rôle représentatif comme dans certains pays et il a notamment un pouvoir de contrôle sur le gouvernement et sur le Parlement, mais le Parlement a lui aussi beaucoup de pouvoir.
On peut dire aussi que c'est un régime semi présidentiel, ça dépend. Les deux termes sont acceptés, mais donc en gros ça veut dire qu'il y a un équilibre des pouvoirs avec quand même beaucoup de places faites au président de la République.
Oui parce que c'est vrai qu'on est dans le régime de la cinquième République qui a été imaginée en grande partie par le général de Gaulle et pour de Gaulle la France avait besoin d'un homme fort parce que surtout à cette époque, on envisageait pas vraiment d'avoir une femme présidente mais d'un homme fort pour diriger le pays. C'est pour ça que voilà, c'est un régime qui donne quand même beaucoup de pouvoir au président.
Mais Charles de Gaulle avait quand même prévu dans la constitution certains mécanismes qui permettent un certain contrôle mutuel de l'exécutif et du pouvoir législatif.
Alors justement, quels sont ces mécanismes de contrôle mutuel entre le président le gouvernement d'un côté et l'assemblée de l'autre. Alors comme Ingrid vous l'a dit, il y a cinq-cent-soixante-dix-sept députés à l'assemblée, c'est pas facile à dire. Ces députés sont élus au suffrage universel direct. Les Français votent directement pour envoyer leurs députés locales, les représenter à l'Assemblée nationale. Ça, on en reparlera un peu plus en détail dans la troisième partie.
Et ces cinq-cent-soixante-dix-sept députés, c'est vrai que c'est difficile à dire, ils siègent à l'Assemblée nationale par groupe. Ils sont tous réunis au sein de partis ou de coalitions et donc dans chaque groupe, on vote en général la même chose, on propose des lois ensemble en fonction d'un programme et de valeurs communes.
Et le parti qui a le plus de députés au Parlement, c'est le parti ou le groupe majoritaire. Cette majorité, elle peut être absolue quand le parti a plus de la moitié des députés, donc cinq-cent-soixante-dix-sept divisé par deux, ça fait combien
Je crois que c'est deux cent quatre-vingt-neuf, il me semble. Oui, il me semble. Deux cent quatre-vingt-huit plus un.
Oui, bon, vous pourrez vérifier, on n'a pas notre sous la main, mais il me semble que pour avoir une majorité absolue à l'assemblée, il faut deux-cent-quatre-vingt-neuf députés. D'ailleurs on n'a pas regardé pourquoi il y a cinq-cent-soixante-dix-sept députés, c'est un peu bizarre comme comme nombre, je ne sais pas.
C'est un calcul fait à partir de la démographie, il y a voilà une, mais ça fera un autre épisode.
C'est la la la bureaucratie française dans toute sa splendeur. Donc si le groupe, si le parti a deux-cent-quatre-vingt-neuf députés à l'Assemblée nationale, il a une majorité absolue. Par contre, si c'est le groupe qui a le plus de députés, mais qu'il en a moins de deux-cent-quatre-vingt-neuf, c'est ce qu'on appelle une majorité relative.
Alors je vous le disais en introduction traditionnellement le président nomme un premier ministre ou une première ministre qui est dans le parti majoritaire à l'Assemblée nationale. Rien ne l'y oblige. Il peut nommer n'importe qui en théorie et le Premier ministre n'est pas obligé non plus de demander à l'Assemblée de valider son gouvernement. Il peut le faire, mais ce n'est pas obligatoire.
Alors si rien n'oblige le président à choisir un premier ministre du parti majoritaire, pourquoi il le fait bien, c'est parce que si le gouvernement veut pouvoir travailler efficacement, il vaut mieux que l'Assemblée nationale soit de son côté, et ce pour deux raisons. D'abord parce que c'est le parlement qui vote les lois, donc si le parlement vote systématiquement contre les lois proposées par le gouvernement, par les ministres, et bien le gouvernement ne peut pas appliquer son programme et aussi parce que l'assemblée a le pouvoir de renverser le gouvernement. Ça, c'est un mécanisme qu'on appelle la motion de censure. Si une majorité de députés votent une motion de censure, bien le gouvernement et le Premier ministre sont obligés de démissionner.
Et le président doit nommer quelqu'un d'autre. Ça n'arrive pas souvent parce que ça mène à une situation très compliquée. Alors disons que la situation la plus courante et la plus facile, c'est quand le président est du même parti que la majorité à l'Assemblée nationale comme ça il peut nommer un premier ministre qui est de son parti. En général, le président nomme quelqu'un qui ne lui fait pas trop d'ombre, c'est-à-dire quelqu'un avec qui il peut travailler en cohésion, mais qui dans les médias, dans les discours, et caetera ne prendra pas sa place et donc ça permet d'avoir voilà une équipe qui travaille ensemble, président, gouvernement et assemblée nationale.
Ouais en fait le Premier ministre en France c'est un peu celui qui fait le sale boulot. C'est pour ça que Emmanuel Macron a eu pendant son premier mandat, il a eu combien
de premiers ministres
Quatre ou cinq je crois, quelque chose comme ça Parce qu'en fait il nomme un premier ministre notamment pour faire appliquer les mesures impopulaires qu'il avait dans son programme et puis la colère des Français se cristallise un peu autour de ce premier ministre, on a l'impression que le premier ministre est responsable de toutes ces lois qu'on n'aime pas et donc au bout d'un moment quand la colère est trop grande, le président décide de renvoyer le Premier ministre et d'en nommer un autre pour le remplacer. On dit aussi parfois que c'est le fusible
non. Fusible d'ajustement Le
fusible d'ajustement, oui quelque chose. Et
et quand le président change de Premier ministre ou choses mais sans vraiment changer puisque c'est toujours le même parti qui continue à gouverner.
Exactement, donc c'était la stratégie de Macron pour dire je fais passer toutes mes mesures, vous n'êtes pas contents, je vous écoute, je fais un remaniement ministériel voilà il y a un nouveau premier ministre mais en fait il va continuer d'appliquer plus ou moins la même politique.
Donc ça c'est le cas où le président a la majorité à l'Assemblée nationale. Par contre, quand la majorité à l'Assemblée est d'un autre parti, le président se retrouve un peu obligé de nommer un Premier ministre ou une première ministre d'un autre parti. Dans ce cas-là, on dit qu'il y a une cohabitation, cohabiter ça veut dire vivre ensemble et dans le cas d'une cohabitation, le président est un peu obligé de s'effacer puisque finalement les pouvoirs sont partagés et on est un peu obligé d'appliquer des lois de la majorité à l'Assemblée nationale. En tout, il y a déjà eu trois cohabitations dans l'histoire de la cinquième République. Elles ont toutes eu lieu dans la deuxième moitié du vingtième siècle.
Donc pour résumer, il y a un équilibre des pouvoirs parce que un, le président peut dissoudre l'assemblée, deux, l'assemblée peut faire tomber le gouvernement avec une motion de censure et troisièmement, le président peut être forcé de s'effacer quand il n'a pas de majorité. Alors ça, c'est l'équilibre des pouvoirs, mais on va vous expliquer pourquoi depuis deux-mille, on avait quand même une certaine stabilité.
Oui parce que comme vous l'imaginez, quand il y a une cohabitation, c'est assez difficile de gouverner. Quand le président de la République et le Premier ministre sont opposés, on a du mal à faire adopter de nouvelles lois. C'est pour ça qu'en deux mille, il y a eu une réforme parce que avant deux mille, le président était élu pour sept ans et les députés étaient élus pour cinq ans. Donc les élections n'étaient pas vraiment alignées et parfois les Français élisaient un président. Deux ans plus tard, il y avait les élections législatives et comme les Français étaient déjà déçus de ce président, ils votaient contre lui pour un parti de l'opposition, ce qui donnait une cohabitation.
Donc pour éviter ces situations et pour permettre de gouverner plus facilement, on a décidé en deux-mille que le président serait élu pour cinq ans pour un quinquennat comme les députés. Donc ce qui se passe c'est qu'il y a les élections présidentielles et deux mois plus tard il me semble il y a les élections législatives. Donc pendant ce délai les Français généralement n'ont pas eu le temps de changer d'avis, ils sont cohérents donc ils votent pour le parti du président qu'ils ont élu, qui permet au président de gouverner plus facilement.
Depuis deux-mille, on a eu plusieurs élections et pratiquement à chaque fois, cette théorie a été validée. En deux-mille-deux, les élections législatives ont donné une majorité au président Jacques Chirac. Dans ce cas-là, on dit que c'est donc une majorité présidentielle. Puis après en deux-mille-sept, Nicolas Sarkozy a aussi eu une majorité présidentielle. En deux-mille-douze, c'était François Hollande.
En deux-mille-dix-sept Emmanuel Macron a aussi eu le droit à sa majorité présidentielle et puis patatras.
Patatras, ouais. En deux-mille-vingt-deux, ça a été plus compliqué parce que le parti d'Emmanuel Macron a obtenu une majorité relative et pas une majorité absolue. Donc pour pouvoir faire passer ces lois, le parti présidentiel à l'Assemblée était obligé de faire des alliances avec d'autres partis en fonction des lois qu'il proposait.
Oui donc Emmanuel Macron a commencé son dernier mandat en étant très faible parce que les partis d'opposition notamment étaient très énervées contre lui et c'était compliqué pour lui de réussir à avoir une majorité et ça c'est important pour comprendre comment on en est arrivé là.
Alors la première partie, on vous a expliqué les mécanismes qui permettent au système politique de s'équilibrer. Maintenant on va voir comment cet équilibre a été rompu, comment le système politique a été déséquilibré au cours des quinze dernières années
Alors on vous en a déjà beaucoup parlé, mais Emmanuel Macron, il est arrivé au pouvoir avec une théorie on va dire du ni ni, c'est-à-dire ni de droite ni de gauche. Ça c'était en deux-mille-dix-sept. Il est arrivé à un moment où dans la politique française, il y avait un peu un rejet du système habituel où on avait un gros parti à gauche, le parti socialiste et un autre gros parti à droite, c'était l'UMP, non c'était les républicains. En gros, c'est un parti de droite qui défend une économie libérale et qui est plutôt qui sont plutôt conservateurs au niveau social. Ça, c'est le système habituel qui favorisait l'alternance.
C'est-à-dire qu'un coup, on avait un gouvernement d'un de ces partis et puis les Français étaient déçus, hop on avait un gouvernement de l'autre partie. Emmanuel Macron est arrivé et il a dit, c'est fini moi je suis ni de l'un ni de l'autre.
Exactement. Donc il est arrivé au bon endroit au bon moment parce que comme tu viens de le dire, les Français commençaient à avoir marre de cette alternance. Ils avaient été déçus à la fois par la gauche et par la droite Donc Emmanuel Macron a dit ce système, c'est du passé, ça ne fonctionne pas moi je vais gouverner avec tout le monde donc on peut dire soit ni la gauche ni la droite soit à la fois la gauche à la fois la droite. Sachant qu'Emmanuel Macron était devenu ministre dans le gouvernement de François Hollande, donc plutôt du Parti socialiste, on s'attendait à ce qu'il soit plutôt de gauche mais bon finalement on peut dire qu'il a retourné sa veste.
Alors je mettrai un peu d'eau dans mon vin c'est-à-dire que mettre un petit peu de comment on pourrait expliquer mettre de l'eau dans son vin ça veut dire atténuer un peu le propos. Je pense qu'en fait certains s'attendaient à ce qu'Emmanuel Macron soit plutôt de gauche parce qu'il voyait son côté jeune, progressiste, qui a fait partie d'un gouvernement socialiste. Mais il y en a d'autres qui voyaient plutôt son côté banquier qui favorise l'économie libérale, qui est en très bons termes avec les chefs d'entreprise. Donc finalement, il donnait un peu de l'espoir à tout le monde et c'est pour ça que dans son gouvernement, dans son groupe majoritaire à l'Assemblée, il y avait des députés qui venaient en fait d'un peu partout, des anciens du Parti socialiste, des anciens du parti les républicains et tout le monde croyait un peu à ce projet, même si ce projet n'était pas très clair puisque comme il n'avait jamais gouverné, on ne savait pas vraiment où il voulait aller. C'était un peu comme un gourou, on peut dire qui avait une énergie folle, qui a été hyper populaire, mais on ne savait pas vraiment où on
allait. Effectivement, en tout cas ce qu'on peut dire c'est que sa stratégie a fonctionné pour son premier mandat, Le parti qu'il a créé en quelques années qui s'appelait la République en marche à l'époque a obtenu une majorité absolue à l'Assemblée. Il a pu gouverner comme il voulait, faire passer toutes ces lois. Et à côté, le Parti socialiste et les républicains ont été totalement laminés. Ils ont continué de perdre des électeurs et d'être très fragilisés.
La preuve, c'est qu'aux élections présidentielles de deux-mille-vingt-deux, donc aux dernières élections présidentielles, le parti des républicains est arrivé cinquième et le parti socialiste dixième. Donc les deux partis qui étaient les partis traditionnels qui alternaient au pouvoir se sont trouvés complètement relégués et c'est le parti d'Emmanuel Macron qui a pris tout le pouvoir.
Donc ça, c'est pour expliquer comment Emmanuel Macron a été élu la première fois. Et alors comment ça s'est passé ensuite une fois qu'il a été élu Finalement ça ne s'est pas aussi bien passé qu'il voulait. Pendant les cinq années de son premier mandat, il y a eu beaucoup de désillusions, beaucoup de personnes ont été déçues parce que finalement il n'a pas réussi à mettre tout le monde d'accord, il a eu d'oppositions, ça on pourrait en parler pendant longtemps, mais on peut citer
par exemple l'exemple des gilets jaunes
dont vous avez entendu parler, qui se sont opposés à lui et qui ont été violemment réprimés pendant les manifestations. Ça, ça a donné l'image que finalement Emmanuel Macron n'était pas l'homme providentiel qui pouvait réconcilier tout le monde et il a commencé à être détesté.
C'est vrai que cette stratégie du nini, elle est à double tranchant parce que soit on peut se dire je vais réussir à convaincre à la fois les gens de gauche et les gens de droite ou au contraire, je vais décevoir et les gens de gauche et les gens de droite. Bon, Emmanuel Macron, il a principalement déçu les électeurs de gauche parce qu'il a au niveau social, il n'a vraiment rien fait pendant ce premier mandat. Mais parmi les électeurs de droite, tout le monde n'était pas non plus totalement satisfait des mesures qu'il a adoptées. Donc après son premier mandat, il a été fragilisé, il s'est retrouvé dans une position un peu plus compliquée au moment de sa réélection.
Et oui parce que comme on vous le disait lors de sa deuxième réélection, Emmanuel Macron n'a pas eu la majorité absolue à l'assemblée. Ce qui fait que pendant deux ans entre deux-mille-vingt-deux et deux-mille-vingt-quatre, il a eu des grosses difficultés à gouverner. Pour chaque loi, le gouvernement devait trouver une majorité en négociant avec d'autres parties. Parfois ça a fonctionné, par exemple la loi immigration a été votée avec le rassemblement national, mais la majorité du temps, ce n'était pas possible. Alors là, c'est
à ce moment-là que le camp macroniste a utilisé
un article de la constitution qui est très contesté. Ouais, il
le fameux quarante-neuf trois dont on a beaucoup parlé dans les médias parce que le parti présidentiel l'a énormément utilisé comme tu l'as dit Ingrid. C'est un article qui permet de faire passer une loi, de faire adopter une loi sans qu'elle soit votée à l'Assemblée. Donc c'est assez dangereux parce que si le parti en abuse, s'il l'utilise trop, l'Assemblée peut décider de voter une motion de censure contre le gouvernement comme on vous l'a dit. Mais là, à l'Assemblée nationale, les partis d'opposition n'ont jamais réussi à être suffisamment nombreux pour faire voter une motion de censure. Donc le parti présidentiel a pu faire adopter toutes ces lois, notamment celles sur la réforme des retraites qui a été énormément contestée en France en utilisant ce fameux quarante-neuf trois.
Oui, parce que juste pour préciser, dans la dernière assemblée entre deux-mille-vingt-deux et deux-mille-vingt-quatre, même si Emmanuel Macron n'avait pas une majorité avec lui, il n'avait pas non plus une majorité contre lui à tel point qu'il voulait faire tomber le gouvernement. Parfois le rassemblement national votait une motion de censure, mais la gauche ne voulait pas voter avec eux. Parfois c'était la gauche qui votait, mais pas le Rassemblement National et en général, les quelques députés de droite traditionnelle ne voulaient pas mettre le chaos donc ils avaient tendance à dire non non, on garde le même gouvernement même si on ne l'aime pas.
Donc vous l'avez compris, Emmanuel Macron et son parti se sont retrouvés dans une position un peu délicate et toute cette colère qui s'est accumulée au fil des années, elle a favorisé les partis d'opposition, en particulier le rassemblement national, le parti d'extrême droite qui avant s'appelait le Front national dont on vous a déjà beaucoup parlé dans le podcast dont le leader est Marine Le Pen et le président est Jordan Bardella. Au cours des dernières années, le Rassemblement National n'a
cessé de gagner du terrain. Alors il y a plein de choses qui expliquent pourquoi l'extrême droite gagne du terrain, la
France n'est pas un cas
Mais disons que une Mais disons qu'une partie des raisons sont liées à la manière de présider d'Emmanuel Macron. Attention, je dis bien que ce n'est pas le seul coupable sinon on va nous tomber mais finalement il a permis que ce parti mais finalement il a permis que ce parti monte et monte pendant que lui gouvernait.
Oui parce que la montée de l'extrême droite en France a commencé bien avant qu'Emmanuel Macron n'arrive sur la scène politique. En deux-mille-deux déjà, ça avait été un choc quand Jean-Marie Le Pen s'était retrouvé au deuxième tour de l'élection présidentielle. Mais là, depuis les années Macron, on peut dire que cette tendance s'est accélérée.
Si bien que cette année, on a eu une élection très importante, enfin pas si importante d'habitude, mais là, elle a beaucoup compté, c'est les élections européennes pendant lesquelles c'était Jordan Bardella qui était le numéro un de la liste et pendant la campagne, on vous en a parlé dans un épisode, le rassemblement national disait que ces élections permettraient de montrer quel est le l'opinion des Français sur la politique nationale. Ce qui fait que quand le résultat est tombé, et ça a été très important en France.
Ouais ça a été une sorte d'électrochoc on pourrait dire parce que c'est le Rassemblement National qui est arrivé premier aux élections européennes avec plus de trente pour cent des voix, ce qui était le double du score du parti d'Emmanuel Macron. Donc là, ça a été une véritable claque.
Le neuf juin, juste après l'annonce des résultats, Jordan Bardella a fait un discours et dans son discours, il a appelé Emmanuel Macron à organiser de nouvelles élections législatives pour que l'assemblée représente mieux les choix des Français.
Oui, ce n'était pas la première fois parce que même pendant la campagne, même avant le résultat des élections, le RN a fait de ces élections européennes des élections nationales en disant qu'elles allaient permettre au peuple français de s'exprimer et que s'ils gagnaient, bien il faudrait dissoudre l'assemblée et organiser de nouvelles élections.
Et qu'est-ce qu'a fait Emmanuel Macron face à cette demande On vous en parle dans la troisième partie.
Alors
personne ne pensait qu'Emmanuel Macron allait écouter les consignes du Rassemblement National mais le neuf juin après les résultats des élections européennes, il a bel et bien décidé de dissoudre l'Assemblée. Et ça, ça a surpris tout le monde, même dans son propre camp, personne ne s'attendait à cette décision.
Le plus surprenant dans son annonce, ça a été que les élections allaient avoir lieu trois semaines plus tard. Il a laissé deux jours aux électeurs pour s'inscrire sur les listes électorales pour ceux qui n'étaient pas encore inscrits et il a laissé une semaine au parti pour déposer les candidatures.
Donc tout le monde s'est demandé pourquoi il avait fait ça et il y a deux théories, deux scénarios qui pourraient l'expliquer. La première théorie, c'est que Emmanuel Macron pensait que les électeurs feraient encore une fois barrage, qu'ils allaient soutenir, qu'ils allaient voter massivement pour son parti pour empêcher le rassemblement national de gagner ces élections législatives et la deuxième théorie c'était que si le rassemblement national gagnait les élections législatives, à ce moment-là il aurait nommé Jordan Bardella premier ministre et comme il est persuadé que le rassemblement national n'est pas capable de gouverner qu'il n'a ni l'expérience ni les compétences, ça aurait prouvé son incapacité à gouverner et ça l'aurait renforcé lui, Emmanuel Macron et son parti pour les prochaines élections présidentielles.
Mais malheureusement pour lui, son plan n'a pas du tout fonctionné.
Alors on imagine que vous avez sûrement déjà vu les résultats des législatives, donc il n'y a pas de suspense, on ne va pas faire durer le suspense. Le Rassemblement National est finalement arrivé troisième et c'est la gauche, c'est le parti du nouveau Front populaire qui a remporté ces élections. Et le parti d'Emmanuel Macron, le parti présidentiel est arrivé deuxième.
Alors il y a trois choses qui expliquent ce résultat. La première et ça ça a été sûrement une grosse surprise pour Emmanuel Macron, c'est que à peine la dissolution annoncée, les partis de gauche se sont réunies et ils ont décidé très rapidement de former une coalition. Ils ont appelé leur coalition nouveau Front populaire, ce qui est un gros symbole parce que c'est une référence au Front populaire qui avait réussi à gagner les élections en mille-neuf-cent-trente-six et puis après ça, ils ont même réussi à présenter un programme commun assez complet.
Oui, et c'est vrai que autant pour les élections présidentielles, on ne s'intéresse pas beaucoup au programme, on vote plutôt pour une personne si on aime bien sa tête ou pas. Autant là pour les élections législatives, on les discussions, les débats concernaient principalement les programmes et le NFP, le nouveau Front Populaire a réussi à proposer rapidement un programme concret et relativement clair, même si c'est vrai que ce programme a été très critiqué, notamment sur le plan économique parce qu'il présentait une rupture radicale avec la politique économique menée jusqu'ici. En gros, beaucoup d'économistes plutôt libéraux disaient que ce programme était impossible à financer.
Mais d'un autre côté, le rassemblement national avait un programme plutôt bancal. Il s'est trouvé qu'au fur et à mesure des interviews, ils n'étaient pas capables d'expliquer leurs mesures et ils n'ont pas arrêté de rétropédaler, c'est-à-dire de faire marche arrière, de dire on va faire ça et le lendemain ah non finalement on ne va pas le faire, ce qui fait que entre les trois parties, un parti qui est déjà au pouvoir et qui n'ont donc ne peut pas vraiment présenter de programme parce qu'à chaque fois on lui dit pourquoi vous ne l'avez pas fait avant. Un parti qui a un programme assez clair et structuré et un autre qui fait que de revenir en arrière, finalement à la grande surprise de Emmanuel Macron dans les débats, la gauche a quand même réussi à bien s'en sortir.
Oui. Et on pense aussi qu'Emmanuel Macron imaginait que les Français n'allaient pas beaucoup participer à cette élection notamment parce que comme tu l'as dit il y avait seulement trois semaines de campagne et que la date du premier tour arrivait début juillet autrement dit au début des vacances et vous le savez pour les Français les vacances c'est sacré, de juillet à août le pays fonctionne au ralenti donc Emmanuel Macron s'était peut-être dit que les Français n'allaient pas beaucoup participer et souvent quand le taux de participation est faible ça peut profiter aux parties présidentielles. Mais comme on l'a dit, ça ne s'est pas du tout passé comme prévu. Les Français se sont déplacés massivement, ils sont allés voter aux urnes et il y a eu un très bon taux de participation puisque deux tiers des Français ont voté alors qu'aux précédentes élections législatives en deux-mille-vingt-deux et deux-mille-dix-sept, ils étaient moins de la moitié, moins de la moitié des Français avaient voté aux élections législatives.
Du coup, le résultat c'est qu'au premier tour, la gauche unie est passée devant le parti de Macron qui s'est retrouvé seulement troisième avec les deux autres loin devant lui. Donc le Rassemblement National a eu vingt-neuf virgule vingt-cinq pour cent, le nouveau Front Populaire vingt-sept virgule quatre-vingt-dix-neuf, donc on peut dire vingt-neuf et vingt-huit et ensuite le parti d'Emmanuel Macron derrière vingt pour cent seulement.
Mais attention ça c'est le résultat du premier tour. Or, on vous a dit qu'aux élections législatives, il y a deux tours. Et pour comprendre les résultats définitifs, il y a une petite particularité du système français comme on aime bien en imaginer et on va vous expliquer ça, c'est important de le comprendre pour comprendre les résultats de ces élections législatives.
Alors accrochez-vous, c'est notre dernière partie, mais elle est un peu technique, mais elle est quand même très importante. Alors on vous explique. Déjà, vous avez remarqué sûrement qu'on dit l'élection présidentielle au singulier, mais on parle tout le temps de les élections législatives au pluriel. Pourquoi Parce qu'en fait on n'a pas une élection législative, on en a cinq-cent-soixante-dix-sept qui ont lieu le même jour.
Oui parce qu'en fait le pays est divisé en cinq-cent-soixante-dix-sept circonscriptions, donc des espaces géographiques dans lesquels il y a à chaque fois le même nombre d'électeurs et dans chaque circonscription, on vote pour élire un ou une candidate.
Donc quand on va voter au moment des élections législatives, on vote pour le ou la députée locale qui nous représentera à l'assemblée.
Et comme on vous l'a dit, il y a deux tours. Au premier tour, il y a un nombre illimité de candidats dans chaque circonscription. En théorie, il pourrait y avoir cent-cinquante candidats alors qu'au deuxième tour, il y en a seulement entre deux et quatre.
Ça fait qu'au premier tour, on vote pour qui on veut, pour le candidat qui représente le parti qu'on aime le le candidat qu'on ne veut vraiment pas voir arriver à l'Assemblée nationale.
Et avant ce mode de scrutin à deux tours, il avait tendance à favoriser les parties de gouvernement au détriment des petits partis qui avaient plus de mal à faire élire des députés à l'Assemblée. Oui, parce que pour avoir des députés, il faut non seulement avoir beaucoup d'électeurs qui adhèrent à vos idées avoir beaucoup de partisans mais il faut aussi ne pas avoir trop d'électeurs qui sont complètement contre vous parce que si vous avez trop d'électeurs qui vous détestent, ils vont faire barrage au deuxième tour et votre candidat ne pourra pas être élu. C'est pour ça que pour un candidat communiste par exemple, c'est très difficile d'être élu et d'aller à l'Assemblée nationale.
Et donc là, on arrive à une dernière explication qui montre pourquoi le rassemblement national est arrivé seulement troisième. Pour que tous les électeurs entre guillemets républicains, en tout cas ceux qui sont contre l'extrême droite puissent voter pour le même candidat et faire donc barrage. Barage, je rappelle qu'on avait expliqué cette notion dans l'épisode qu'on avait fait déjà en deux-mille-vingt-deux.
Ouais, l'épisode sur les castors, donc cet animal qui construit des barrages et on vous avait dit que certains Français en avaient marre d'être pris pour des castors et de passer chaque élection de passer leur temps à faire des barrages au lieu de vraiment voter pour le candidat qui représente leurs idées Donc ça, on vous a dit que c'était important à comprendre parce que en fait, c'est le rassemblement national qui a obtenu le plus de voix au deuxième tour. Il a obtenu trente-deux pour cent des voix, mais ça ne s'est pas transformé en nombre de députés parce qu'au niveau du nombre de députés, c'est seulement le troisième parti. Donc il est arrivé en tête pour le nombre de voix, mais seulement troisième pour le nombre de députés.
Oui parce que du coup il y a des endroits où le candidat du Rassemblement National a eu une majorité, mais vraiment très très très importante, alors qu'il y a plein d'autres endroits en France où finalement ils ont été bloqués. Ça crée un certain déséquilibre. Ce qui fait que maintenant à l'Assemblée, on a trois groupes. Le groupe majoritaire, c'est celui du nouveau groupe populaire, mais c'est une majorité relative très relative, ils sont très très loin d'avoir la moitié des députés. Ensuite on a les députés du camp de Macron et enfin en troisième position, le groupe le plus important c'est celui du rassemblement national.
Alors on a quand même un ordre avec le en premier la gauche, en deuxième le centre droit et en troisième l'extrême droite.
Mais c'est vrai que quand on regarde le nombre de députés, la différence est assez marginale. Il me semble que le NFP en a cent-quatre-vingt-neuf. Bon à vérifier et ensuite le parti de Macron en a cent-soixante-dix quelque chose comme ça donc il n'y a pas une énorme différence donc on a vraiment maintenant ces trois blocs qui s'opposent et comme on vous le disait, cette décision de Macron de dissoudre l'assemblée s'est totalement retournée contre lui lorsqu'il est passé d'une position où il avait une majorité, alors une majorité relative mais quand même une majorité qui lui permettait de gouverner à une situation où son parti est maintenant deuxième et c'est un parti d'opposition, le NFP qui a une majorité relative.
Alors maintenant comme on vous le disait il y a toujours un gouvernement qui est l'ancien gouvernement et Emmanuel Macron ne se décide pas à nommer quelqu'un. Il attend, il attend, il attend de voir si peut-être il y a des coalitions qui se créent pour avoir une une majorité absolue avec plusieurs parties qui seraient réunies ou alors il attend un miracle, je ne sais pas, mais en tout cas c'est la situation est assez compliquée. La gauche estime qu'elle devrait quand même gouverner et en tout cas ce qui est sûr, c'est qu'Emmanuel Macron n'a pas le droit de re dissoudre l'assemblée avant un an.
Voilà, donc l'assemblée va rester dans cette configuration pour au moins un an. Il faut dire aussi qu'au sein du NFP, la situation est un peu compliquée parce que c'est le rassemblement du Parti socialiste de la France insoumise et du parti des Verts, le parti écologiste et il n'arrive pas à se mettre d'accord pour proposer un Premier ministre qu'Emmanuel Macron pourrait nommer Donc tout ça, ça fait que c'est un peu le bazar pour le dire poliment C'est la raison pour laquelle on n'a pas voulu dans cet épisode faire trop de scénarios parce que c'est assez difficile de savoir comment ça va se passer dans les prochaines semaines. On a préféré vous expliquer les mécanismes, la situation, les mécanismes qui ont conduit à la situation actuelle et on espère que ça vous aidera à mieux comprendre tout ce que vous pourrez lire dans les médias français dans ces prochaines semaines.
On s'arrête là J'espère qu'on aura été assez clair.
Ouais, je pense que c'était assez dense comme épisode. N'hésitez pas à poser vos questions dans les commentaires si vous avez besoin de clarifier certaines choses. On essaiera de prendre le temps de de vous expliquer s'il y a encore des choses qui ne sont pas claires Merci à toutes celles et ceux qui ont eu le courage et la patience de nous écouter jusqu'au bout et on se retrouve dans deux semaines pour un épisode plus léger.
Salut à dans deux semaines.