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Le 7 10. Sur France Inter.

Pierre Haski, bonjour. Bonjour Nicolas. Dans Géopolitique ce matin, vous revenez sur l'intervention du président de la République.

Le nom de Donald Trump n'a pas été prononcé une seule fois par Emmanuel Macron dans son allocution hier soir. C'est pourtant le président des États-Unis qui suscite cette intervention et cet appel à la prise de conscience des nouveaux risques, ce ton grave et pas forcément très rassurant du chef de l'État. Dès le début Emmanuel Macron a parlé des États-Unis, notre allié, comme pour répondre à l'une des inquiétudes majeures depuis quelques jours, l'Amérique de Trump est-elle devenue notre adversaire avec des hauts et des bas, elle était notre alliée depuis mille-neuf-cent-quarante-cinq. Même quand le général de Gaulle avait retiré la France du commandement militaire intégré de l'OTAN en mille-neuf-cent-soixante-six, il avait pris soin de préserver l'alliance politique. Le mot allié ne fait pas partie du vocabulaire de Donald Trump, mais ça fait partie des non-dits de l'heure.

C'est toute la complexité du règlement de la guerre en Ukraine et de la question plus large de la sécurité européenne. Que voulez-vous dire Pierre Malgré les décisions et attitudes très contestables de Trump, Emmanuel Macron ne critique pas frontalement le président américain Nicolas. Le rapport de force est clairement en sa faveur aujourd'hui. C'est ce qui se passe avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Humilié dans le bureau ovale vendredi dernier, il a subi lundi l'annonce de la suspension de l'aide militaire américaine et hier celle tout aussi grave du partage du renseignement et pourtant Zelensky s'est fendu d'une lettre à Donald Trump dont celui-ci a fait état dans son discours au congrès, il s'y montre reconnaissant et humble face à l'homme qui l'a pourtant chassé de la maison blanche.

C'est de la réelle politique, les États-Unis ont l'avantage. Vous n'avez pas de carte en main avait lancé crûment Trump à Zelensky lors de leur clash, c'était hélas vrai. Le résultat est que les Européens sont condamnés à limiter la casse dans le rapprochement Trump Poutine qui les sidère. Ils ne peuvent qu'espérer que Donald Trump achète leur plan de déploiement de troupes européennes après un cessez-le-feu dont a parlé hier soir le président.

Et l'Europe est-elle condamnée à subir

C'est tout l'enjeu du discours de mobilisation d'Emmanuel Macron hier soir aux accents gaullien sans référence pour autant au général. Si elle ne veut pas rester prise en tenaille entre une Russie menaçante et des États-Unis imprévisibles, l'Europe de la défense doit enfin voir le jour. C'est le serpent de mer de la construction européenne depuis des décennies, toujours repoussé par ceux qui redoutaient d'effrayer les Américains. Le monde a changé, d'abord en deux-mille-vingt-deux avec l'invasion de l'Ukraine par la Russie, puis en deux-mille-vingt-cinq avec l'arrivée de Donald Trump et son slogan l'Amérique d'abord. Les Européens doivent faire en peu de temps ce qu'ils n'ont pas réussi à accomplir en un demi-siècle.

Ça commence véritablement aujourd'hui à Bruxelles avec des décisions historiques sur le financement de cet effort de défense européen. Tout aussi historique, l'annonce par le président de la République hier soir de l'ouverture d'un débat sur l'extension à l'Europe du parapluie nucléaire français, 100 pour 100 français a-t-il dit. Encore un hommage indirect à de Gaulle, lui qui en mille-neuf-cent-soixante-deux estimait que la dissuasion nucléaire avait aussi pour but de dissuader un protecteur abusif. Avant-le, c'était bien vu.

Podcast: Géopolitique
Episode: Macron sonne la mobilisation pour que l’Europe ne reste pas prise en tenaille entre Poutine et Trump