Donc oui, il a fait extrêmement chaud dans l'hémisphère nord comme ça avait été le cas dans l'hémisphère Mais changeons de sujet parce que je n'ai pas envie de vous déprimer, les médias traditionnels le font déjà très bien. Aujourd'hui, on va parler des Français et de leur rapport à la nourriture. Mais avant ça, juste un mot concernant le podcast, quelques détails logistiques. Vous vous souvenez peut-être qu'avant les vacances, on avait organisé un sondage pour vous demander votre avis sur le podcast. Vous avez été quasiment 6 mille à y répondre, donc merci beaucoup.
Ça nous a permis de mieux comprendre vos attentes, ce que vous attendez du podcast et vous avez répondu en majorité que vous voulez juste qu'on continue à faire la même chose. Alors oui, il y en a qui préfèrent les épisodes en solo, d'autres les conversations avec Ingrid et une petite minorité préfère les interviews avec des invités. On sait que les conversations sont encore un peu difficiles pour certains d'entre vous, mais je vous rappelle que la transcription est là pour vous aider et que si un épisode vous pose problème, c'est une bonne idée de l'écouter plusieurs fois, c'est comme ça que vous allez progresser. Avec Ingrid, on s'est mis d'accord pour faire un épisode en solo et un autre en duo chaque mois, donc deux épisodes par mois Et de temps en temps, on fera une interview avec un ou une invité qu'on trouve intéressant. Comme ça, tout le monde y trouvera son compte, tout le monde trouvera quelque chose qui lui plaira.
On avait aussi évoqué la question du financement du podcast, Aujourd'hui, on est plusieurs à travailler dessus. Il y a bien sûr Ingrid, Chris, notre ingénieur du son et Marina qui s'occupe de corriger les donc il faut un certain budget pour produire chaque épisode. Ce n'est plus comme au début quand je faisais tout tout seul, mais c'est plus reposant. Dans le sondage, vous nous avez dit que vous seriez d'accord pour qu'il y ait des publicités ou un abonnement qui donnerait accès à des épisodes bonus. Mais pour le moment, on n'a pas encore pris de décision, donc pas de changement non plus de ce côté-là.
On prend les mêmes et on recommence. Voilà, c'est tout pour la partie logistique. Alors pourquoi j'ai décidé de vous parler de nourriture aujourd'hui. Vous rassure tout de suite, on ne va pas parler de véganisme. Je sais qu'il y en a parmi vous qui y sont allergiques.
Non, dans cet épisode, on va s'intéresser à trois questions. Est-ce que les Français sont en bonne santé parce qu'ils boivent du vin Est-il vrai que les Françaises ne grossissent jamais Comment un nutritionniste français a inventé un des régimes les plus populaires du monde Ça va être l'occasion de voir plein de mots très utiles pour la vie quotidienne et d'en apprendre un peu plus sur les habitudes alimentaires des Français. Allez, c'est parti. Avez-vous déjà entendu parler du french paradoxe Là, vous vous dites oui, mais lequel C'est vrai que les Français sont bourrés de paradoxes, mais le french paradoxe, c'est une expression qui désigne un phénomène en particulier, un phénomène qui concerne la santé. Dans les années quatre-vingt, des scientifiques français se sont rendus compte que leurs compatriotes étaient moins touchés par les maladies coronariennes que d'autres nations.
Les maladies coronariennes, ce sont les maladies qui touchent le coeur quand le sang est bloqué dans les artères et qu'il n'arrive plus au coeur. Par exemple, l'infarctus, la crise cardiaque. On les appelle aussi parfois maladies cardiovasculaires. En général, les maladies coronariennes sont causées par un excès de mauvais cholestérol. Ce cholestérol s'accumule dans les artères, ce qui fait que le sang a moins de place pour circuler.
Et quand il y a trop de cholestérol, les artères finissent par se boucher, par être bloquées. Le sang ne peut plus du tout circuler. C'est là que le malade a une crise cardiaque. Alors cette accumulation de mauvais cholestérol, elle est liée à plusieurs facteurs sur lesquels on n'a aucune influence comme l'âge, le sexe, l'ethnicité ou l'hérédité. Par exemple, si vous êtes un homme de plus de cinquante-cinq ans, vous avez statistiquement plus de risques d'avoir une crise cardiaque que le reste de la population.
Mais le cholestérol dépend aussi de nos choix et de notre style de vie. Si vous mangez des aliments gras, des aliments riches en graisses saturées, Si vous fumez, si vous ne faites pas d'exercices physiques et si vous êtes stressé, vous êtes une machine à produire du mauvais cholestérol. Et vous savez qui passait son temps à manger gras, fumer et ne pas faire de sport Les Français dans les années quatre-vingt. J'utilise l'imparfait parce que les choses ont changé, mes compatriotes fument beaucoup moins qu'avant et ils font plus attention à ce qu'ils mangent, Mais à l'époque, dans les années quatre-vingt, le style de vie des Français était l'exemple à suivre pour développer des maladies coronariennes. Pourtant, des études scientifiques ont montré que les Français faisaient moins souvent d'infarctus que les habitants d'autres pays comparables comme le Royaume-Uni par exemple.
Donc les épidémiologistes ont commencé à se demander pourquoi. Mais une autre organisation a devancé les épidémiologistes. Devancer ça veut dire faire quelque chose avant quelqu'un. L'organisation qui a devancé les épidémiologistes, qui a proposé une explication avant les épidémiologistes, c'est l'office international de la vigne et du vin, un puissant lobby viticole, un lobby qui défend les intérêts des producteurs de vin. C'est ce lobby qui a inventé l'expression french paradoxe.
En mille-neuf-cent-quatre-vingt-six, l'office international de la vigne du vin a publié une lettre dans laquelle il affirmait que les Français étaient mieux protégés des maladies coronariennes que les Britanniques ou les Américains grâce à la richesse de leur cuisine et de leur vin. Cette lettre a donc été l'acte de naissance du French Paradoxe, la célèbre théorie selon laquelle le vin serait bon pour la santé. Mais à l'époque, cette théorie n'avait pas de caution scientifique sérieuse. Elle n'a reçu cette caution scientifique que quelques années plus tard grâce à un médecin français Serge Renaud. Serge Renaud était médecin et chercheur à l'université de Bordeaux et il avait un grand-père vigneron, un grand-père qui produisait du vin.
Donc vous pouvez imaginer qu'il avait très envie de vérifier cette théorie. Il a mené une étude à la fin des années quatre-vingt et en novembre mille-neuf-cent-quatre-vingt-onze, il est allé en présenter les résultats dans une émission de télé américaine de la chaîne CBS News, l'émission SixTi Minutes. Sa conclusion était sans appel. Je le cite, les Français ont trois virgule cinq fois moins de risques de maladies cardiovasculaires que les Américains et ce grâce à leur consommation modérée de un à trois verres de vin rouge par jour. L'année suivante, en mille-neuf-cent-quatre-vingt-douze, il s'est associé à un cardiologue, Michel de L'Orgeril pour publier un article dans la prestigieuse revue scientifique de Lancet.
Dans cet article, les deux auteurs ont repris l'expression french paradoxe avec la même explication, mais d'une manière moins tranchée, d'une manière un peu plus nuancée. Cette fois, ils l'ont seulement présenté comme une hypothèse, pas comme une conclusion définitive. Et ils ont précisé que c'était une hypothèse partielle en admettant que d'autres facteurs que la consommation de vin rouge jouaient sûrement un rôle dans ce phénomène. Dans tous les cas, le grand public a été immédiatement convaincu par cette théorie. La preuve, cette année-là aux États-Unis, les ventes de vin rouge ont augmenté de trente-neuf pour cent par rapport à l'année précédente.
Vous vous en doutez, le lobby du vin était ravi d'avoir cette caution scientifique. Maintenant il pouvait clamer haut et fort que le vin était bon pour la santé sans que personne ne le contredise. Mais ça n'a pas duré longtemps. Après la publication de l'article dans The Lancet, d'autres chercheurs ont décidé d'étudier ce french paradoxe et ils ont rapidement découvert plusieurs erreurs et approximations dans les travaux de leurs collègues français. Pour commencer, ils étaient victimes d'un biais méthodologique, le biais de corrélation.
Quand deux choses sont corrélées, ça ne veut pas dire que l'une est nécessairement la cause ou la conséquence de l'autre. Oui, les Français consomment plus de vin et sont moins touchés par les maladies coronariennes, mais peut-être que c'est dû à d'autres facteurs qui n'ont rien à voir avec le vin. Il est prouvé que notre alimentation a une influence sur notre santé, mais il est difficile de connaître l'influence d'un type d'aliment en particulier sur une chose aussi complexe que les maladies les morts par maladies cardiovasculaires étaient sous-déclarés en France. Les autorités médicales françaises avaient tendance à attribuer d'autres causes à ces décès. Donc les Français ne sont peut-être pas aussi ne protège pas des maladies coronariennes.
Elle a une influence marginale sur certaines d'entre elles, mais elle augmente les risques avec d'autres. Et surtout en recommandant de boire du vin même de façon modérée, on augmente le risque d'alcoolisme. L'alcool est une substance extrêmement addictive. Est-ce que vous recommanderiez à quelqu'un de fumer une à deux cigarettes par jour, même si ça avait quelques effets bénéfiques pour la santé Moi non, mais le lobby du vin oui. C'est pour ça que malgré les nombreuses études scientifiques qui ont invalidé le french paradoxe, les lobbys du vin continuent d'en faire l'apologie.
Faites le test chez vous, entrez French Paradox dans un moteur de recherche et vous verrez tous ces lobbys apparaître dans les résultats. Passons à une autre croyance sur les Français ou plutôt les Françaises. On entend parfois qu'elles peuvent manger tout ce qu'elles veulent sans jamais prendre de poids, sans jamais grossir. Elles ont la chance de pouvoir s'empiffrer de croissance sans aucune conséquence. De pain, de fromage, de viande en sauce et malgré tout ça, elles restent minces, elles ne prennent pas un gramme.
Cette image des Françaises, on la doit en grande partie à Mireille Guiliano. En deux-mille-cinq, elle a publié un livre intitulé French Women Don Get Fat qui est rapidement devenu un best-seller aux États-Unis. D'ailleurs, vous remarquerez qu'encore une fois, c'est une Française qui invente un paradoxe sur ses compatriotes et qui va en faire la promotion aux États-Unis. Apparemment, c'est une stratégie gagnante. Dans son livre, Mireille Guiliano raconte qu'à dix-huit ans, elle est allée aux États-Unis faire un échange étudiant et qu'en rentrant en France, son père lui a dit qu'elle ressemblait à un sac à patate parce qu'elle avait pris neuf kilos.
Sac à patates, autrement dit sac de pommes de terre, c'est une insulte pour les personnes qu'on juge grosses. Sac à patates. Je me souviens que c'était une insulte assez populaire quand j'étais à l'école primaire, mais aujourd'hui je pense qu'elle est un peu démodée. Bref Mireille Guiliano explique comment elle a fait pour retrouver la ligne après cette expérience traumatisante. Retrouver la ligne, ça veut dire revenir à son bon poids.
On dit aussi garder la ligne qui signifie ne pas grossir. Si vous achetez un magazine féminin français, vous êtes sûr de voir ces expressions sur la couverture. Dix recettes pour retrouver la ligne. Comment garder la ligne pendant les fêtes, et caetera. Alors justement comment les Françaises font-elles pour garder la ligne Selon Mireille Guiliano, il n'y a rien de révolutionnaire.
Les Françaises ont juste des bonnes habitudes et une attitude saine vis-à-vis de la nourriture. Par exemple, elles ne sont pas obsédées par leur poids, ne passent pas leur temps à vérifier si elles ont pris ou perdu quelques kilos. D'ailleurs, elles n'ont même pas de balance chez elles. Une balance, c'est cet objet qu'on utilise pour se peser, pour savoir combien de kilos on fait. Les Françaises n'ont pas besoin de se peser parce que si elles mangent un peu trop à un repas, elles ajusteront automatiquement au repas suivant.
Elles n'ont pas non plus besoin de compter les calories de chaque aliment parce qu'elles savent manger en quantité raisonnable. Elles s'autorisent à manger de tout, elles ne se privent pas des plaisirs de la table, mais elles le font toujours avec modération. Comme avec le vin, le secret c'est la modération. Parmi les autres bonnes habitudes des Françaises, Mireille Guiliano cite prendre le temps de manger, faire une longue pause le midi pour déjeuner. Quand les Françaises mangent, elles ne font pas autre chose en même temps comme regarder la télévision.
En France, on mange seulement à l'heure des repas, on ne grignote pas, autrement dit on ne mange pas de snack, On fait nos courses au marché pour acheter des produits de qualité. On cuisine au lieu d'acheter des plats préparés pour ne pas mettre de produits chimiques dans notre assiette. Malheureusement, la réalité des Français et des Françaises est assez différente de ce que Mireille Guiliano décrit dans son livre. Déjà, si les Françaises ne grossissent pas, comment expliquer que cinq millions d'entre elles sont touchées par l'obésité Il faut croire que les bonnes habitudes alimentaires ne sont pas aussi universelles que ça. Oui, tout le monde n'a pas le temps de cuisiner chaque repas ni les moyens d'acheter des produits au marché.
Il y a des familles françaises qui regardent la télévision en mangeant et d'autres qui grignotent entre les repas. Comme les Américains, ils aiment aller dans les chaînes de fast-food. D'ailleurs, la France est le deuxième plus gros marché pour McDonald's et selon une étude récente, la moitié des gens de ma génération y vont au moins une fois par mois, la moitié. Mais mettons sa critique de côté. Après tout Mireille Guiliano n'est pas sociologue, son livre n'a pas pour ambition de peindre un tableau fidèle de la société française.
Elle vend simplement une certaine image de la France, une image qui plaît aux étrangers. Le problème, c'est que cette image renforce la double pression qui pèse sur les Françaises. D'un côté, elles doivent être des bonnes vivantes. Être un bon vivant, ça veut dire être un épicurien, profiter des plaisirs de la vie. Et parmi ces plaisirs, la nourriture occupe une place centrale.
Si vous ne prenez pas de dessert au restaurant, vous n'êtes pas un bon vivant. Si vous ne mangez pas de viande, vous n'êtes pas un bon vivant. Si vous ne buvez pas d'alcool, vous n'êtes pas un bon vivant. Si vous commandez une salade parce que vous faites attention à votre ligne, vous n'êtes pas un bon vivant. Mais en même temps, les Françaises doivent rester minces.
Le sociologue Thibault de Saint-Paul a mené plusieurs études qui montrent que la France est l'un des pays qui valorise le plus la minceur chez les femmes. Ça explique pourquoi les Françaises ont un des IMC les plus bas parmi les pays riches. L'IMC, c'est l'indice de masse corporelle, un indicateur qu'on mesure à partir de la taille et du poids d'une personne. Les Françaises ont un IMC considérablement plus bas que les Britanniques ou les Suédoises par exemple, mais elles sont plus complexées par leur corps. Dans cette étude, 6 françaises sur dix déclaraient vouloir maigrir, vouloir perdre du poids.
Autrement dit, elles sont plus minces que les femmes des autres pays, mais elles sont quand même plus insatisfaites de leur corps. Au contraire, pour les hommes, la minceur n'est pas appréciée. Il vaut mieux avoir une corpulence plus forte. C'est vrai que moi, quand j'étais adolescent, j'étais très mince et j'avais des complexes par rapport à ça. Donc plus tard, j'ai décidé d'aller à la salle de sport pour me muscler.
D'ailleurs, depuis une dizaine d'années, les salles de sport sont devenues très populaires en France. Avant, il n'y en avait pas beaucoup, mais aujourd'hui, il y en a absolument partout. Ce qui m'a le plus surpris en lisant cette étude, c'est que ces canons, ces standards de beauté ne sont pas universels. Ça semble assez évident quand on y pense, mais moi j'étais persuadé que dans tous les pays, on préfère les hommes musclés et les femmes minces. Mais non.
En Uruguay par exemple, c'est l'inverse. On apprécie les hommes minces et les femmes rondes. En Corée du Sud, la minceur est valorisée aussi bien pour les femmes que pour les hommes. Dans cette étude, la France était aussi le pays où il y avait la plus grande différence entre l'idéal masculin et l'idéal féminin. Les Françaises doivent être minces et les Français doivent être corpulents.
Donc les Français ont de la chance parce qu'ils peuvent être des bons vivants et rester attirant alors que pour les Françaises, c'est beaucoup difficile de concilier les deux. Au lieu d'intituler son livre Les Françaises ne grossissent pas, Mireille Guiliano aurait dû l'appeler les Françaises n'ont pas le droit de grossir. Pendant longtemps faire un régime c'était quelque chose d'un peu honteux pour les Français. Faire un régime ça veut dire suivre un plan alimentaire pour maigrir, pour perdre du poids. Dans certains pays, les gens sont fiers de dire qu'ils font un régime parce que ça montre qu'ils font des efforts pour retrouver la ligne.
Mais en France, jusqu'à récemment, les gens avaient honte de dire qu'ils faisaient un régime. Ils le faisaient en cachette, en secret. Enfin, je dis les gens, mais évidemment ça concernait surtout les Françaises comme on vient de le voir. Mais à votre avis, pourquoi les Françaises avaient-elles honte de dire qu'elles faisaient un régime Tout simplement parce que les bons vivants ne font pas de régime, c'est incompatible. Pour être un bon vivant, il faut profiter de tous les plaisirs de la table sans se restreindre.
Si vous êtes au restaurant avec des amis français et que vous commandez une salade parce que vous êtes au régime, ils vont penser que vous n'êtes pas une bonne vivante. Mais bien sûr, ça n'a pas empêché les régimes de devenir populaires en France. Parmi ces régimes, il y en a même un qui s'est exporté dans le monde entier, le régime du camp. Peut-être que ce nom vous dit quelque chose, peut-être même que vous l'avez essayé. C'était un régime très à la mode dans les années deux-mille.
Il était même suivi par des célébrités comme Kate Middleton, Jennifer Lopez ou encore l'ancien président français François Hollande. L'inventeur de ce régime, c'est le nutritionniste Pierre Ducand ou plutôt l'ancien nutritionniste. Vous allez comprendre pourquoi. En deux-mille, il a publié un livre intitulé, Je ne sais pas maigrir. Dedans, il promettait à ses lecteurs et ses lectrices qu'ils allaient pouvoir perdre du poids rapidement et durablement.
Le régime du camp a fait un carton en France et s'est très bien vendu tellement bien qu'il a ensuite été traduit et publié à l'étranger. Alors comment ce régime fonctionne exactement C'est un régime hyperprotéiné qui consiste à manger principalement de la viande et du poisson. Pas de chance pour les végétariens. Mais en plus, il faut supprimer tous les sucres de notre alimentation, ne plus manger de sucre. En suivant ce principe, notre corps devient en manque de glucose, de sucre, donc quand il a besoin d'énergie, au lieu d'utiliser du glucose, il brûle les graisses qu'il a en réserve.
C'est en brûlant ces graisses qu'on perd du poids. Il faut savoir que le régime du camp n'est pas vraiment novateur, ce n'est pas le premier régime hyperprotéiné qui est apparu. Mais alors pourquoi est-il devenu si populaire Il y a trois raisons qui peuvent expliquer son succès. La première, c'est qu'il est assez spectaculaire. Les gens qui le suivent perdent pas mal de poids dès les premières semaines.
Donc ça donne l'impression que le régime fonctionne et ça permet d'avoir des photos impressionnantes de transformation avant après. La deuxième raison de son succès, c'est que contrairement à d'autres régimes, avec le régime du camp, on a le droit de manger autant qu'on veut du moment qu'on ne mange pas de sucre. Il n'y a pas besoin de compter ses calories. Si on a envie de manger trois steaks à midi, on peut. Donc on n'a pas l'impression de se priver et on ne passe pas la journée à penser au prochain repas parce qu'on a faim.
Enfin, la troisième raison, c'est la personnalité de Pierre Ducand. En plus d'être nutritionniste, Pierre Ducand est aussi un excellent marketeur. Il a été un des premiers à avoir le potentiel d'internet pour promouvoir son régime. À l'époque, c'était le tout début des réseaux sociaux, mais Pierre Ducand et son entreprise ont rapidement créé une communauté autour de leur régime. Les gens qui suivaient le régime s'étaient même trouvé un surnom, les Duconautes.
Dans cette communauté, ils pouvaient se motiver, s'échanger des conseils et des recettes. Ça a très bien marché. En plus, Pierre Ducand avait aussi des talents d'entrepreneurs. Il a créé une entreprise avec une centaine de salariés pour faire la promotion de son régime à l'international, créer des produits, des coachings sur internet, et caetera. Grâce à tout ça, on estime qu'il a gagné plusieurs dizaines de millions d'euros en quelques années.
Malheureusement, les gens qui suivaient le régime du camp ont commencé à remarquer certains effets secondaires, notamment des problèmes de digestion et des douleurs d'estomac. Et oui, quand on mange seulement de la viande et du poisson, on a vite mal au ventre. Un autre effet secondaire assez désagréable, en particulier pour l'entourage des duconautes, c'est qu'ils avaient mauvaise haleine. L'haleine, c'est l'odeur qui sort de notre bouche. Donc avoir mauvaise haleine, ça veut dire sentir mauvais de la bouche.
À cause de cet effet secondaire, on a surnommé le régime du camp, le régime tu veux un chewing-gum Mais l'effet secondaire le plus problématique, c'était les compulsions alimentaires. Une compulsion alimentaire, c'est une façon un peu formelle de dire que vous avez très envie de manger un certain type d'aliments. Comme vous pouvez l'imaginer, quand on suit le régime du camp, on finit par avoir très envie de manger quelque chose de sucré. Un dessert, une part de gâteau, une glace, n'importe quoi. Au bout d'un moment, ça peut devenir une véritable obsession.
Une obsession à laquelle il est difficile de résister. Résultat, les gens craquent. Ils cèdent à la tentation et ils avalent trois paquets de gâteaux d'un coup. Ensuite, ils culpabilisent, ils se sentent mal et ils ont un sentiment d'échec. Ça explique pourquoi dans beaucoup de régimes, il y a ce qu'on appelle un effet yoyo.
Je ne sais pas si on utilise cette expression dans d'autres langues. Le yoyo, vous savez, c'est ce jouet pour enfant, une sphère attachée à une ficelle qu'on fait descendre puis remonter. C'était très à la mode quand j'étais enfant, on avait des yoyo lumineux avec lesquels on faisait des figures. Bref, quand on parle d'effet yoyo, ça signifie qu'une chose monte et descend sans arrêt. Avec les régimes, il y a souvent un effet yoyo, notre poids fait le yoyo.
Au début, il descend, on perd du poids, mais après le régime, il remonte, on grossit à nouveau. C'est très difficile de stabiliser notre poids. Il arrive même qu'un régime soit contre-productif. On reprend plus de poids qu'on en a perdu. En deux-mille-onze, le journal Libération a mené une enquête auprès de quasiment cinq-mille personnes qui avaient suivi le régime du camp.
Et cette enquête a montré que trois ans après le régime, quatre-vingts pour cent d'entre elles étaient revenues à leur poids d'origine. Évidemment, suite à la publication de ces résultats, les gens ont commencé à remettre en question l'efficacité du régime du camp. Au même moment, les autorités sanitaires françaises ont décidé d'étudier le régime du camp de plus près pour voir son impact sur la santé. Le régime du camp de plus près pour voir son impact sur la santé. Et elles ont découvert d'autres effets secondaires encore plus graves que ceux qui étaient déjà connus.
Des problèmes rénaux, autrement dit des problèmes concernant les reins, ces deux organes qui filtrent le sang en rejetant les déchets dans l'urine, des carences en fibres et en vitamines, des risques d'ostéoporose, c'est-à-dire de fragilisation des os et même une augmentation des risques de maladies cardiovasculaires et de cancer. Mais ce qui a vraiment mis fin à la popularité du régime du camp, c'est Pierre du camp lui-même. En deux-mille-douze, il a fait une proposition très polémique aux candidats à l'élection présidentielle. Il leur a suggéré d'instaurer une option antiobésité au bac, examen de fin du lycée. Concrètement, il proposait que les élèves gagnent des points s'ils arrivaient à garder un IMC normal, autrement dit de les noter en fonction de leur poids.
Évidemment, cette proposition a scandalisé l'opinion publique parce qu'elle stigmatisait les adolescents en surpoids ou ceux souffrant de troubles alimentaires comme l'anorexie. À ce moment-là, Pierre Ducand s'est fait un nouvel ennemi, l'ordre des médecins, l'organisme qui régule les professions médicales en France. L'ordre des médecins a jugé que Pierre Ducan ne respectait pas le code déontologique de sa profession à la fois à cause de ses déclarations dangereuses dans les médias, mais aussi parce qu'il utilisait son nom pour commercialiser un régime dont l'efficacité n'était pas prouvée scientifiquement. L'ordre des médecins a attaqué Pierre Ducan en justice, mais comme il se doutait de ce qui allait lui arriver, il a pris l'initiative de demander lui-même sa radiation de l'ordre des médecins. Donc depuis deux-mille-douze, il n'a plus le droit d'exercer en tant que nutritionniste, Conséquence de cette mauvaise presse, en deux-mille-quinze, son entreprise a fait faillite.
Mais Pierre Ducand n'a pas disparu. Il a repris ses affaires quelques années plus tard pour continuer de vendre son régime avec beaucoup moins de succès qu'avant comme vous pouvez l'imaginer. Le vin qui est bon pour la santé, les Françaises qui ne grossissent pas et les promesses du régime du camp, quand les choses semblent trop belles pour être vraies, c'est qu'elles ne le sont pas. J'espère qu'avec cet épisode vous comprenez un peu mieux l'attitude des français vis-à-vis de la nourriture. Je voulais aussi vous parler d'obésité et de grossophobie, mais finalement je le ferai dans un futur épisode parce qu'il y a beaucoup de choses à dire.
Pour finir, je vous souhaite une bonne rentrée, que vous retourniez à l'école, à l'université ou au travail. Bon courage à toutes et à tous et je vous retrouve dans deux semaines avec Ingrid pour discuter de minimalisme et d'environnement. À bientôt.